BLOGUE. Le PDG d'Ubisoft, Yves Guillemot, était de passage à Montréal mercredi pour faire le point sur la vision d'avenir de son entreprise, dans le cadre du Sommet du jeu de Montréal.
Malheureusement, la conférence de M. Guillemot est un peu tombée à plat. On n'y a à peu près parlé que de concepts assez vagues de jeux plus « sociaux », connectés en tout temps et analysant le comportement du joueur pour lui offrir une meilleure expérience. Des concepts qui, de surcroît, sont déjà assez bien connus.
Je n'ai de toute façon jamais été du genre assez naïf pour croire qu'un président de grande entreprise allait venir se présenter devant un parterre de concurrents et exposer précisément les visions de son entreprise. Ce genre de conférence se transforme presque toujours en successions de banalités ou, sinon, en série de fausses pistes.
Ceci dit, M. Guillemot avait des réponses un peu plus intéressantes par après, en entrevue individuelle.
Une partie significative de l'avenir d'Ubisoft pourrait se jouer non pas dans ses studios, mais dans les salles de conférences de concurrents fortunés ou de banques d'investissement. C'est que, depuis un an, l'action d'Ubisoft a perdu environ la moitié de sa valeur.
À 4,22 euros l'action, son prix de clôture mercredi, la capitalisation boursière d'Ubisoft est d'environ 400 millions d'euros, ou 560 M$. Ce n'est pas « donné », mais c'est franchement tentant pour un concurrent qui souhaiterait s'en porter acquéreur. À elle seule, la marque Assassin's Creed pourrait selon certaines estimations très sommaires valoir près de la moitié de cette somme.
M. Guillemot et ses frères, les fondateurs de l'entreprise, auraient un pouvoir de dissuasion limité. Ils sont propriétaires d'environ 10% de l'entreprise et de 20% des droits de vote.
Le principal intéressé, qui n'avait pourtant pas caché son agacement de voir son rival Electronic Arts prendre une part de 20% d'Ubisoft il y a quelques années (revendue depuis), ne se dit pas trop inquiet. « Il y a toujours des risques », se contente-t-il de commenter.
Selon lui, « les gens attendent un peu de voir ce que nous allons faire à la fin de l'année », en termes de résultats financiers. Les deux dernières années ont été difficiles. Des résultats positifs, croit-il, pourraient ragaillardir le titre.
Une grosse partie de ces résultats futurs dépend de la performance d'Assassin's Creed, qui sera sur les tablettes dans moins de deux semaines. À certains égards, Ubisoft n'est présentement pas sans rappeler Activision, avant que celle-ci ne fusionne avec Blizzard en 2007.
L'entreprise s'est alors hissée au sommet du palmarès des développeurs indépendants sur la force d'un grand jeu (Call of Duty) et une franchise de jeux musicaux (Guitar Hero). Le sort d'Ubisoft repose beaucoup sur un grand jeu (Assassin's Creed) et une série de jeux musicaux (Just Dance et ses dérivés).
Sauf qu'aujourd'hui, chez Activision, la franchise Guitar Hero est morte et Call of Duty doit enfin cette année faire face à un concurrent de taille, nommé Battlefield. Y a-t-il là de quoi inquiéter M. Guillemot? Pas vraiment.
« Au dernier E3, nous avons montré Far Cry 3, qui sortira l'an prochain, et Rayman, qui est déjà très apprécié. Ubisoft a d'autres marques. Activision n'avait pas tant d'autres marques que ça. »
Quant aux plans d'Ubisoft dans les domaines du cinéma, dont M. Guillemot parle depuis si longtemps, ils sont encore au stade des discussions avec les studios. Les franchises Splinter Cell, Ghost Recon et Assassin's Creed sont ciblées par une équipe à l'interne. Une autre franchise, Les lapins crétins, fait déjà l'objet d'un contrat pour une série télé qui devrait être diffusée par Nickelodeon en 2013.
M. Guillemot a aussi voulu revenir sur une information diffusée mercredi matin par La Presse, à l'effet que l'entreprise n'atteindra « vraisemblablement pas » son objectif de 3000 employés à la fin 2013.
« Nous n'avons pas dit cela, a insisté M. Guillemot. Nous avons simplement dit que c'était plus difficile de recruter, parce qu'il y a beaucoup d'entreprises autour et que ce n'était pas si évident que cela. Mais nous avons toujours pour objectif d'atteindre les 3000 à la fin 2013. Si ce n'est pas à la fin 2013, ce sera à la fin 2014. »