L'année 2013 devrait être celle où les utilisateurs de téléphones intelligents des grandes villes canadiennes comme Montréal, Toronto ou Vancouver commencent à expérimenter des « heures de pointe » sur les réseaux mobiles, prédit Deloitte.
La firme de consultation a rendu publiques mardi ses prévisions 2013 pour les univers des technologies, des médias et des télécommunications (TMT). Celles-ci couvrent plusieurs champs, dont les téléviseurs 4K, les services de télévision par Internet ou encore les ventes d'ordinateurs et de tablettes. Mais ce sont surtout les prévisions concernant le spectre qui ont retenu mon attention.
« Aux États-Unis, on vit déjà des épisodes de congestion des réseaux », note l'un des auteurs de ces prédictions, Duncan Stewart, en entrevue. « Le Canada a environ 18 à 24 mois de retard. Mais dès 2013, on pourrait commencer à en voir dans les villes canadiennes de plus de 1 million d'habitants. C'est de la congestion, comme sur les routes. »
Selon Deloitte, lors de ces épisodes, « les utilisateurs peuvent s'attendre à vivre deux à trois fois plus de tentatives de connexion ratées, trois à quatre fois plus d'appels déconnectés ou de sites Web gelés, ainsi que des vitesses 3G ou 4G réduites de 50 à 90% ».
C'est que la quantité de fréquences disponibles, ainsi que l'évolution des technologies afin de mieux les utiliser, n'arrivent pas à suivre la progression de la demande. Celle-ci a plus que doublé chaque année depuis 2009, rappelle Deloitte. L'appareil intelligent typique génère aujourd'hui 35 fois plus de trafic qu'un téléphone mobile traditionnel. De 2012 à 2016, le volume de données échangées via ces réseaux pourrait être multiplié par 50!
Ajouter des fréquences prend du temps, note-t-on. Le passage de la télé hertzienne de l'analogique au numérique, réalisé afin de libérer des fréquences qui seront éventuellement réassignées aux réseaux mobiles, a été réalisé au Canada le 31 août 2011. Les enchères devant servir à vendre ces fréquences n'ont pourtant pas encore débuté, et encore moins la construction des réseaux devant en tirer profit.
La seule autre façon de réduire la congestion est d'améliorer l'efficacité de l'utilisation des fréquences disponibles. Mais là encore, le progrès ne suit pas la demande, explique Deloitte. Les réseaux 4G qui utilisent la norme LTE sont 16 fois plus efficaces pour transmettre des données que leurs prédécesseurs. Mais pendant les sept années qu'il a fallu pour développer et implanter cette norme, la demande a été multipliée… par 30.
Des solutions, page 2
Une évolution de la norme LTE, baptisée LTE-Advance, arrivera bientôt, mais elle ne fera « que » doubler la capacité des réseaux. C'est à peine suffisant pour contenir un an d'augmentation de la demande.
L'une des solutions possibles serait de faciliter l'implantation de nouvelles antennes. Or, l'opposition citoyenne à l'érection de nouvelles tours se fait de plus en plus forte. Est-ce que les effets de la congestion seraient suffisamment néfastes pour atténuer les récriminations? J'en doute.
Une autre serait d'augmenter les prix des forfaits de données, fait valoir Deloitte. « Si le spectre est réellement une ressource rare, utiliser le prix pour en signaler la valeur devrait atténuer la demande suffisamment pour éviter une détérioration de la qualité du service. » C'est logique, mais encore là fort susceptible de susciter la grogne.
À long terme, la solution envisagée par Deloitte est le passage aux réseaux hétérogènes (HetNets). Il s'agit de permettre à un appareil d'assurer facilement la transition entre des réseaux utilisant des normes différentes, même en cours d'utilisation. Il serait par exemple possible d'amorcer une conversation téléphonique en étant branché à un réseau mobile, puis de la poursuivre en étant branché à un réseau sans fil local (WiFi).
Des préoccupations liées aux normes, à la technologie et aux modèles économiques demeurent toutefois, de sorte qu'il serait étonnant de voir cette technologie implantée en 2013, selon Deloitte.