Les agriculteurs québécois délaissent la production de haricots pour se tourner vers des cultures plus rentables et moins risquées, comme le soya. Mauvaise nouvelle pour Agro-Haribec, un exporta-teur de haricots, qui doit s'approvisionner à l'étranger pour répondre à la demande de ses clients en Europe et au Moyen-Orient.
Établi à Longueuil, ce producteur de haricots secs «cranberry» vendus en sachets s'approvisionnait exclusivement au Québec encore en 2008. Mais depuis, le déclin de la production québécoise de haricots force Haribec à devenir négociant : il doit maintenant acheter une bonne partie de ses haricots - déjà ensachés par d'autres entreprises - dans l'Ouest canadien, en Argentine et en Chine pour les revendre ensuite à ses clients réguliers. «C'est la seule façon de ne pas les perdre», dit Érik de Franciosi, vice-président de la PME.
Benoit Legault, président de la Fédération des producteurs de cultures commerciales du Québec, confirme que beaucoup d'agriculteurs du Québec délaissent les haricots au profit du soja. «Pour un producteur, les prix du soja sont beaucoup plus intéressants.»
Ce sont les producteurs de maïs qui cultivent le soya et les haricots en alternance. Actuellement, ils font beaucoup plus de soya. «Même la production de maïs diminue», constate Benoit Legault. De 2007 à 2011, cette production au Québec a chuté de 28,5 %, à 2,9 millions de tonnes, selon Statistique Canada.
Trouver de meilleures marges
Malgré la diversification de ses approvisionnements, Haribec a vu sa production diminuer à son usine de Saint-Aimé, en Montérégie. «Notre production a chuté de 60 % depuis trois ans», déplore Érik de Franciosi.
Pour en limiter l'impact sur son chiffre d'affaires, Haribec a commencé à vendre des haricots en Turquie, au Liban et dans les Émirats arabes unis (la PME exporte 100 % de sa production). Ces pays sont plus risqués que ses marchés traditionnels d'Europe orientale, mais il lui procure en revanche des marges bénéficiaires plus élevées, car il y a moins de concurrents.
Malgré tout, c'est insuffisant pour compenser complètement la chute de sa production. Pour Érik de Franciosi, la lumière au bout du tunnel, c'est la Chine. «Nous y achetons des haricots pour les vendre ailleurs dans le monde. Mais dans deux ans, nous pensons que la Chine consommera davantage de haricots et deviendra un marché d'exportation pour nous. Le prix du haricot augmentera et incitera les agriculteurs québécois à retourner vers cette culture.» Selon Agriculture et Agroalimentaire Canada, les 27 pays de l'Union européenne et les États-Unis continueront d'être «à long terme» les principaux débouchés pour les exportations canadiennes de haricots secs.
Production de haricots de 2001 à 2010¹ - 56,3 %
Production de soya de 2001 à 20101 + 156,2 %
¹ Pour 2010, données estimées et préliminaires